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Part 6
Après ma rééducation, ils m'ont envoyé en psychiatrie. "Pour être sûrs."
J'avais perdu énormément de masse musculaire, je n'ai pas utilisé mes jambes pendant quatre mois. Encore aujourd'hui, il m'est déconseillé de courir trop longtemps. Je dois y aller progressivement. Ça ne me déplaît pas. Mes jambes sont jolies comme ça. Je suis restée toute seule pendant tous ces mois. Je ne suis pas allée en cours. De toute façon, je rattraperai facilement.
D'abord, j'étais toute seule. Je n'étais pas une patiente difficile. Ils ont vite cerné mon cas. J'étais dépressive, mais pas suicidaire. Je ne cherchais pas spécialement à me tuer. Ils ont dit que je sortirais vite.
Puis j'ai pété un miroir. Je mangeais rien parce que je trouvais tout ça dégueulasse. J'ai ramassé un bout de verre et je me suis coupée la main profondément, par accident. Ils ne m'ont pas crue. On m'a mise dans une chambre à deux. Pour que mon compagnon de chambre me surveille...
Je suis restée deux jours dans mon lit. Sans manger. Sans boire. On m'a mise sous perfusion. Je passais mon temps à dormir, et à regarder le ciel, jour comme nuit. J'étais mal. C'était pas chez moi ici, je n'avais rien ni personne. Ça faisait un mois. Et ma famille n'était pas venue.
" Je suis désolée d'être vivante.. "
Est devenue ma phrase courante.
Mon existence dénuée de sens,
N'est remplie que de désespérances.
A ces mots..
Je fus pris de sanglots.Durant une nuit d'insomnie, j'ai écrit ça sur le mur, derrière moi. Les infirmières ne se sont pas énervées. Elles ont simplement effacé, en m'adressant un énième "Il faut que tu manges...". Oh, vous savez, il faut que je fasse tellement de choses. Il faut que je sois heureuse, surtout, dans cette société. Le suis-je? Non. Alors s'il faut que je mange... Je m'en fiche pas mal. Plus les jours passaient et plus je m'épuisais. Je me réveillais de plus en plus rarement. La psy qui s'occupait de moi parlait dans le vide. Je ne l'entendais presque plus, comme j'entendais les ambulanciers. J'étais à nouveau en train de mourir. Puis elle est venue. Elle s'est assise sur un coin de mon lit, et m'a demandé "Et toi, tu meurs quand?".
Je me suis retournée vers elle. Je me suis sentie perforée. Mon coeur avait un trou béant. Elle m'a sourit de ses grands yeux gris clair. Elle avait des cheveux bleus, un énorme pull en laine, et des poignets tous fins. Je savais pourquoi elle était là. Et elle avait un piercing. Un piercing à la lèvre. Un petit anneau un peu décalé par rapport à la symétrie de sa lèvre inférieure. Et quelles fossettes. Sa fragilité m'avait touchée bien plus que je ne l'imaginais.
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